Faute d'Empire...

Ce petit livre est un manuel d'espérance. Claude Terrien — parce qu'il est « pied-noir » par sa mère, et parce qu'il a grandi à Alger — a été blessé, plus douloureusement que d'autres, par le drame algérien. Mais il n'a jamais cédé à la tentation qui a fait fleurir - sur les murs d'Alger - ce cri désespéré : vive la mort ! Ses nombreux auditeurs d'Europe n° I, qui ont pu suivre - jour après jour - son cheminement patient et lucide à travers les vicissitudes de l'actualité, savent que l'adhérence du passé n'a jamais freiné son élan vers l'avenir. Ce livre en apporte la preuve la plus éclatante. Faute d'Empire… la France est l'une des nations les plus jeunes du monde. Et comme la densité de sa population est relativement faible — il y aurait 120 millions de Français si la France était aussi « habitée » que l'Allemagne occidentale — les tâches qui s'offrent à notre jeunesse sont immenses. Déjà, des chantiers s'ouvrent un peu partout, l'on voit surgir Acier sur mer (Dunkerque), la carte se couvre d'un réseau de nervures, qui seront demain autant d'autoroutes, et l'atome pacifique va bouleverser le marché de l'énergie. Mais la révolution à laquelle nous assistons, est plus profonde encore. Deux espèces de Français sont en voie de disparition : le « paysan » attaché à la terre par une sorte de malédiction native, et le manœuvre non spécialisé — en somme les deux représentants les plus typiques de la masse qu'on appelait « prolétarienne ». En revanche, l'espèce « technicienne » se multiplie, d'une diversité et d'une dispersion surprenantes. Il n'est pas jusqu'à l'artisanat, voué à la disparition par les théoriciens marxistes d'autrefois, qui ne connaisse, grâce à l'électricité, grâce à l'automobile, une surprenante renaissance. Les innombrables aspects de cette révolution technique, Claude Terrien les évoque dans des pages qui sont autant de coups de projecteur sur le syndicalisme, le patronat, l'Éducation nationale, les loisirs, l'Europe… Pages excitantes et brèves, trop brèves peut-être, mais n'est-ce pas le plus grand des éloges ?